Un personnage important au sein du gouvernement
Taraki était Hafizulla Amin dont beaucoup pensent qu’il avait été recruté par la
CIA pendant ses années d’études aux Etats-Unis. En septembre 1979, Amin s’empara
du pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat militaire. Il fit exécuter Taraki, mit
un terme aux réformes et assassina, emprisonna ou exila des milliers de
partisans de Taraki tout en instaurant un état islamique fondamentaliste.
Au
bout de deux mois, il fut renversé par un noyau de membres du PDP associés à des
militaires.
Il convient d’insister sur le fait que tout cela s’est passé
avant l’intervention militaire soviétique. Zbigniew Brzezinski, conseiller à la
Sécurité nationale, a publiquement admis - des mois avant que les troupes
soviétiques n’envahissent le pays - que l’administration Carter avait versé des
sommes énormes aux extrémistes musulmans pour torpiller l’action du gouvernement
réformateur. Certaines de ces interventions consistaient en attaques violentes
de moudjahiddins (combattants de la guérilla islamique), soutenus par la CIA,
contre des écoles et des enseignants dans les zones rurales.
A la fin de
1979, le gouvernement PDP, assailli de toutes parts, demanda à Moscou de lui
fournir un contingent de troupes pour contenir les moudjahiddins et les
mercenaires étrangers, tous recrutés, financés et équipés par la CIA. Les
Soviétiques avaient déjà soutenu des projets d’aide au développement des
ressources minières, de l’enseignement, de l’agriculture et de la santé
publique. Le déploiement de troupes représentait un engagement beaucoup plus
sérieux et politiquement dangereux. Il fallut que Kaboul s’y prenne à plusieurs
reprises avant que Moscou n’accède à sa demande d’intervention militaire
Jihad et taliban, façon CIA.
L’intervention militaire
soviétique était une occasion en or pour la CIA de transformer une guerre
tribale en une guerre sainte, en un jihad islamique, destinée à expulser les
communistes sans dieu de l’Afghanistan. Au fil des ans, les Etats-Unis et
l’Arabie Saoudite dépensèrent environ quarante milliards de dollars pour la
guerre en Afghanistan. La CIA et ses alliés recrutèrent, équipèrent et
entraînèrent environ cent mille moudjahiddins radicaux provenant de quarante
pays musulmans, parmi lesquels le Pakistan, l’Arabie Saoudite, l’Iran, l’Algérie
et l’Afghanistan. Parmi ceux qui répondirent à l’appel, se trouvait un certain
Oussama Ben Laden et ses hommes.
Au terme d’une guerre longue et
infructueuse, en février 1989, les Soviétiques évacuèrent le pays. On croit
généralement que le gouvernement marxiste PDP s’effondra peu après le départ des
Soviétiques. En réalité, il conserva suffisamment de soutien populaire pour
combattre trois années encore, survivant ainsi d’un an à l’Union Soviétique.
En prenant le pouvoir en Afghanistan, les moudjahiddins se mirent à se
battre entre eux. Ils ravagèrent les villes, terrorisèrent les populations,
pillèrent, organisèrent des exécutions de masse, fermèrent les écoles, violèrent
des milliers de femmes et de jeunes filles et réduisirent en ruines la moitié de
Kaboul. En 2001, Amnesty International rapporte que les moudjahiddins
utilisaient les violences sexuelles comme « méthode d’intimidation des
populations vaincues et comme récompense pour les soldats. »
Dirigeant le pays comme des gangsters à la recherche de revenus
faciles et abondants, les chefs tribaux ordonnèrent aux paysans
de planter des pavots. L’ISI pakistanaise, proche partenaire
junior de la CIA, installa des centaines de laboratoires
d’extraction d’héroïne à travers
l’Afghanistan. Deux ans après l’arrivée de la
CIA, la frontière Pakistan-Afghanistan était devenue la
plus grosse productrice d’héroïne au monde.
Largement créés et financés par la CIA, les
mercenaires moudjahiddins acquirent leur autonomie. Des centaines d’entre eux
entrèrent ainsi en Algérie, en Tchétchénie, au Kosovo et au Cachemire pour
entreprendre des actions terroristes au nom d’Allah et à l’encontre de ceux
qu’ils considéraient comme ayant corrompu l’Islam.
En Afghanistan même,
à partir de 1995, une branche extrémiste de l’Islam sunnite, « les talibans »,
abondamment financée et conseillée par l’ISI et par la CIA avec le soutien des
partis politiques islamiques pakistanais, se fraya un chemin vers le pouvoir,
prenant le contrôle de presque tout le pays et emmenant dans son sillage, à
grand renfort de menaces et de cadeaux, beaucoup de chefs tribaux.
Les
talibans s’engagèrent à mettre fin aux luttes entre factions et au banditisme
qui était la marque des moudjahiddins. Les personnes soupçonnées de meurtre ou
d’espionnage étaient exécutées tous les mois dans les stades et celles qui
étaient accusées de vol avaient la main coupable tranchée. Les talibans
condamnaient toutes les formes « d’immoralité », comme le sexe avant le mariage,
l’adultère et l’homosexualité. Ils mettaient aussi hors la loi la musique, les
spectacles, les librairies, la littérature, l’éducation laïque et l’essentiel de
la recherche scientifique.
Les talibans instaurèrent un règne de terreur religieuse,
imposant une interprétation plus stricte encore de l’Islam
que celle du clergé de Kaboul. Tous les hommes devaient porter
la barbe non taillée et les femmes devaient porter la burqa qui
les couvre de la tête aux pieds, y compris le visage. Ceux qui ne
se soumettaient pas rapidement à ces contraintes se voyaient
rapidement et sévèrement sanctionnés par le
Ministère de la vertu. Une femme qui quittait le domicile
conjugal ou accusait son époux de violences se retrouvait
sévèrement fouettée par les autorités
religieuses. Les femmes étaient exclues de la vie sociale,
privées de l’essentiel des soins médicaux,
écartées de tous les niveaux d’enseignement et de
toutes les possibilités de travail à
l’extérieur. Les femmes qui étaient jugées
« immorales » étaient lapidées à mort
ou enterrées vivantes.
Rien de tout cela ne perturbait les dirigeants à
Washington et ils s’accommodaient fort bien des talibans. Et même, jusqu’en
1999, le gouvernement US a versé la totalité du salaire annuel de chaque
officiel du gouvernement taliban. Ce n’est qu’à partir d’octobre 2001, quand le
président George W. Bush a eu besoin de rallier l’opinion publique derrière sa
campagne de bombardement de l’Afghanistan, qu’il a dénoncé l’oppression des
femmes. Son épouse, Laura Bush, se métamorphosa en une nuit en une féministe
convaincue pour émettre un discours détaillant certains des abus commis contre
les femmes en Afghanistan.
La seule chose positive que l’on peut mettre
au crédit des talibans, c’est qu’ils mirent un frein aux pillages, viols et
crimes que les moudjahiddins avaient commis jusque-là de façon régulière. En
2000, les autorités talibanes ont également éradiqué la culture du pavot dans
tous les territoires sous leur contrôle, une action presque complètement
couronnée de succès selon le Programme de contrôle des drogues des Nations
unies.
Avec le renversement des talibans et la réinstallation à Kaboul,
en décembre 2001, d’un gouvernement moudjahiddin choisi par les Occidentaux, la
production d’opium a repris de plus belle en Afghanistan.
Les années de
guerre qui ont suivi ont coûté des dizaines de milliers de vies afghanes. A côté
de ceux qui ont été tués par les missiles de croisière, les bombardiers furtifs,
les bombes à fragmentation et les mines, il y a tous ceux qui continuent à
mourir de faim, de froid, de manque d’abris et de manque d’eau potable.
La sainte croisade pour le pétrole et le gaz.
Bien qu’ils
prétendent combattre le terrorisme, les dirigeants US se sont trouvé d’autres
raisons bien plus motivantes, mais bien moins avouables, pour s’enfoncer plus
encore dans le bourbier afghan.
Cette région d’Asie centrale est riche en
gisements de gaz et de pétrole. Dix ans avant le 11 septembre, le Time magazine
du18 Mars 1991 faisait savoir que les élites politiques US y envisageaient une
présence militaire. La découverte de vastes gisements de gaz et de pétrole au
Kazakhstan et au Turkménistan constituait l’appât, tandis que la dissolution de
l’Union Soviétique ôtait l’obstacle majeur à la poursuite d’une politique
d’intervention agressive dans cette partie du monde.
Les compagnies
pétrolières US ont acquis les droits sur 75 % environ de ces nouvelles réserves.
Exporter ce pétrole et ce gaz de régions enclavées était un problème majeur. Les
officiels US se sont opposés à l’utilisation des pipelines russes ou à l’accès
direct au golfe Persique à travers l’Iran. Au lieu de cela, ces officiels et les
compagnies contractantes ont envisagé des voies alternatives à travers
l’Azerbaïdjan et la Turquie vers la Méditerranée ou encore à travers la Chine
vers le Pacifique.
La voie qui avait la préférence d’UNOCAL, une
compagnie basée aux Etats-Unis, traversait l’Afghanistan et le Pakistan vers
l’océan Indien. Les tractations intensives qu’UNOCAL menait avec le régime
taliban n’aboutirent à rien, jusqu’à ce qu’en 1998 une compagnie argentine ne
fasse une offre plus avantageuse pour le pipeline. La guerre de Bush contre les
talibans mit fin aux espoirs d’UNOCAL de participer à l’entreprise.
Il
est intéressant de remarquer que les administrations Clinton et Bush n’ont
jamais placé l’Afghanistan sur la liste officielle du département d’Etat des
pays accusés de financer le terrorisme, cela en dépit de la présence reconnue
d’Oussama Ben Laden comme hôte du gouvernement taliban. Cette qualification d’ «
état voyou » aurait rendu impossible, pour une compagnie US de prospection ou de
reconstruction, la signature avec Kaboul d’accords pour l’installation d’un
pipeline vers les champs pétroliers et gaziers d’Asie centrale.
En
somme, bien avant les attaques du 11 septembre, le gouvernement US avait préparé
le terrain pour intervenir contre les talibans et installer un gouvernement
croupion à Kaboul ainsi qu’une présence militaire directe en Asie centrale. Les
attaques du 11 septembre ont fourni le détonateur idéal, mobilisant l’opinion
publique US et les alliés encore hésitants à soutenir une intervention
militaire.
On peut être d’accord avec John Ryan lorsqu’il défend l’idée
que, si Washington avait laissé tranquille le gouvernement Taraki en 1979, « il
n’y aurait pas eu d’armée de moudjahiddins, pas d’intervention soviétique, pas
de guerre de destruction en Afghanistan, pas d’Oussama Ben Laden et pas de
tragédie du 11 septembre. »
Mais c’était trop demander à Washington que
de laisser en paix un gouvernement de gauche progressiste qui organisait la
société en fonction des besoins publics collectifs plutôt qu’en fonction de
l’accumulation privée.
L’intervention US en Afghanistan ne s’est pas avérée
très différente de ce qu’elle avait été au Cambodge, en Angola, au Mozambique,
en Ethiopie, au Nicaragua, à Grenade, au Panama et ailleurs. Elle avait le même
objectif de prévenir des réformes sociales égalitaires et aboutissait au même
résultat : renverser des gouvernements favorables aux réformes économiques. Dans
tous ces cas, les interventions ont réinstallé au pouvoir des éléments
rétrogrades, laissé une économie en ruine et détruit sans pitié un grand nombre
de vies innocentes.
La guerre contre l’Afghanistan, pays appauvri et
martyrisé par la guerre, continue à être présentée dans les cercles officiels US
comme une croisade chevaleresque contre le terrorisme. Il n’en est rien, cela a
été un moyen pour faire bien d’autres choses : détruire un ordre social
progressiste, prendre le contrôle très bénéfique d’une des dernières vastes
réserves encore intactes au monde d’une énergie fossile en voie d’épuisement et
implanter des bases militaires US dans une région supplémentaire.
Face à
tout cela, l’appel d’Obama pour le « changement » sonne creux.
Michael Parenti
4 mai 2010
Grèce. Jean-Pierre Brard
« Ce plan est fait pour les marchands
d’armes »
Ce n’est pas un plan d’aide à
la Grèce, mais un plan d’aide aux
créanciers de la Grèce et aux marchands
d’armes français et allemands. On va donner de
l’argent au gouvernement grec pour que la BNP, la
Société générale, Credit
suisse, la Deutsche Bank et les marchands d’armes touchent
leur chèque.
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Le plan est uniquement conçu pour
couvrir ces créances. La Grèce consacre vingt
fois plus de son PIB à l’armement que la moyenne
des États du monde, achète 13 % des
armes allemandes, et à peu près le même
volume à la France. Le plan vise à renflouer les
créanciers en faisant payer le prix fort au peuple grec. Les
banquiers français sont le plus engagés, avec 75
milliards de dollars à récupérer,
suivis des Suisses à hauteur de 64 milliards et des
Allemands à 43 milliards. Cela est passé
complètement inaperçu, mais il s’agit
de sommes colossales. On nous dit :
“Votez ce plan pour éviter la faillite de la
Grèce.” C’est faux. Si
celui-là n’est pas voté, ce sont les
créanciers qui paieront dans
l’immédiat. Il faut un plan d’aide, mais
un autre plan. Après les subprimes, les
spéculateurs ont cherché un nouvel angle
d’attaque en s’en prenant aux États.
Après la Grèce, d’autres victimes
viendront, dont la France. L’enjeu, c’est donc de
sortir de ce système.
Nous proposons de créer une agence de notation
européenne, de renégocier le traité de
Lisbonne, qui interdit à la BCE de venir en aide au pays de
la zone euro alors qu’elle peut le faire en faveur des autres
pays de l’UE, de créer une sorte de FMI
européen qui serait une structure publique sous le
contrôle des gouvernements et non de la BCE, de mettre en
place une taxe sur les mouvements de capitaux, de demander la
réduction du budget militaire grec, et
l’établissement de relations directes
d’État à État avec des pays
hors zone euro disposant de fonds souverains pour sortir de la
dépendance des banques et des réseaux financiers.
Concrètement, cela veut dire négocier avec des
pays comme la Chine ou les Émirats arabes unis des
prêts à long terme et sans
intérêts, de sorte que pas un sou
n’aille dans la poche des banques. Ce serait une nouvelle
façon d’envisager les relations
financières internationales et de faire face à la
spéculation des banques.
Propos recueillis par S.C.
Sur le WEB: 5 mars 2010
LE COMBAT DU PEUPLE GREC EST NOTRE COMBAT !
Face à une agression jamais connue depuis la chute du
régime « des Colonels » (en fait un régime
fasciste instauré par le gouvernement des Etats Unis en
s’appuyant sur la racaille monarcho-fasciste qui avait
collaboré avec les nazis, Papadopoulos, le chef de la clique des
Colonels, était un ancien des « Bataillons de
Sécurité », équivalent de la Milice) le
peuple grec est en train d’organiser sa riposte malgré
cliquez pour lire la suite
le fait que les deux grands partis du pays, le PASOK, le PS grec, et la
ND, l’UMP grecque, soutiennent en véritables Quisling le
plan d’assassinat social de l’Union Européenne
laquelle apparait, même pour les plus aveugles, comme une arme de
destruction massive des acquis sociaux populaires et de la
dignité nationale des peuples.
Quant aux syndicats d’ « accompagnement », ils
tentent de saboter la riposte populaire en refusant de lui donner
l’ampleur nécessaire. Notons que le PS grec, digne
héritier des Ebert et Scheidemann bouchers de la
révolution allemande, est l’outil que la bourgeoisie
grecque et européenne ont choisi pour se livrer à cette
attaque sans nom : baisse des salaires, recul de l’âge de
la retraite, démolition pierre par pierre des acquis de dizaines
d’années de lutte.
Le prétexte à cette politique, à cette
violence anti populaire, est l’état des finances de la
Grèce. En quoi le peuple est il responsable des tricheries, du
gangstérisme des classes dirigeantes grecques, connues et
soutenues par l’UE ? En rien ! Et il faudrait que le peuple, dont
la jeunesse fut décrite il y a peu comme la «
génération 700 euros » (salaire moyen «
espéré » par les jeunes quand ils ont le «
privilège » de travailler) accepte un tsunami social pour
payer les milliards engrangés par les spéculateurs grecs,
européens et étatsuniens sur leur dos ?
Il faudrait que les victimes du capitalisme soient encore davantage
victimes pour que le nouveau Reich des Sarkozy, Merkel, Brown et autres
Papandréou soient satisfaits ? Les salariés grecs payent
leurs impôts ! Ce sont les capitalistes qui fraudent et
spéculent ! « Il faut faire payer les pauvres ! »
proclament l’UE et ses proconsuls « grecs ». Et bien
messieurs le peuple grec dit « OXI » ! NON ! Les manifs et
les grèves se succèdent, au premier rang, comme toujours,
le grand KKE, le Parti Communiste de Grèce, le parti de la
dignité populaire et nationale, le parti qui organisa la
Résistance patriotique et antifasciste, qui combattit les armes
à la main la terreur monarcho-fasciste instaurée par la
Grande-Bretagne et les USA de 44 à 49, le parti qui subit des
décennies de répression (exécutions, assassinats,
prison, exil, interdit professionnel…), le parti qui finit par
vaincre les « Colonels » en rendant ce régime
inacceptable aux yeux de l’opinion publique internationale
après l’insurrection de Polytechnique, le parti qui, seul,
dénonce et annonce depuis des mois, le résultat de la
collusion du PS et de la Droite, tous deux soumis aux diktats de
l’UE.
Ce matin on apprenait que le Ministère des Finances est
occupé par des militants du PAME, le syndicat de lutte des
travailleurs Grecs, acte politique et symbolique fort ( l’EAM -la
Résistance grecque- occupa le Ministère du Travail
pendant l’occupation et empêcha l’instauration du
Service du Travail Obligatoire en Grèce, seul pays occupé
à n’avoir jamais permis cette instauration). Sur la
façade du Ministère une banderole proclame : «
Soulevez - vous ! Pour que les mesures ne s’appliquent pas !
». Ce soir PAME et le KKE appellent à de nouvelles
manifestations, hier les retraités ont affronté une
police « hésitante ». Une nouvelle grève
générale est annoncée. Cette lutte est exemplaire.
De son issue beaucoup de choses vont dépendre, là-bas
comme ici et dans toute l’Europe. Le combat du peuple grec est
notre combat ! Que le KKE, la KNE et le PAME qui prennent la tête
du combat patriotique et social soient assurés de notre
indéfectible solidarité militante