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Rapport comité fédéral du 26
septembre 2011.
La situation politique de la France et de l’Europe est
marquée principalement par la crise
financière
Pourquoi cette
crise?
Après la
crise financière des subprimes de 2007 venue des Etats Unis, les États sont
intervenus financièrement et très massivement pour sauver le système bancaire,
s’endettant au passage très lourdement. Aujourd’hui, ceux-là même
qui avaient « fauté » par leur imprévoyance face à l’évidence
(les agences de notations par exemple) viennent donner des leçons aux États.
Les marchés dont la cupidité nous a plongés dans la crise en viennent
maintenant à exiger des mesures d’austérité. Mesures d’austérité qui visent ni
plus ni moins à faire payer cette crise aux peuples et à rassurer
les « investisseurs », c'est-à-dire leur garantir qu’ils vont
pouvoir continuer à se gaver sur le dos du plus grand nombre. Les causes de la
crise sont nombreuses, on peut essayer d’en distinguer quatre plus
particulièrement :
1. Une cause
endémique au système, à sa la
logique profonde c’est la course effrénée au profit. Des colonisations à
la mondialisation, des guerres aux frappes chirurgicales, peut importe
« comment », ce qui compte c’est « combien » cela rapporte.
« La
course au profit est destructrice : elle est, explique Marx, indifférente
aux valeurs d'usage, c'est-à-dire au sort fait aux personnes et à la
nature »
Pour
répondre à cet objectif, après une période où dans le prolongement de la
seconde guerre mondiale les « possédants » ont du beaucoup lâcher,
ils n'ont de cesse depuis les années 70 de reprendre du terrain et d'en gagner
de nouveaux
2. Des Etats
qui doivent recourir aux banques pour se financer. L’obligation faite à l'État en 1973,
généralisée et consacrée avec le traité de Maastricht de 1992, de se tourner
vers le privé pour ses besoins de financement a des conséquences dramatiques.
Auparavant l'État pouvait emprunter directement et sans intérêts auprès de la
Banque Centrale. Cette possibilité perçue comme un manque à gagner par les
banques a été interdite au profit de l’endettement sur les seuls marchés
financiers. « la somme actualisée des intérêts de dettes payées aux
marchés depuis 1973 représentent pour la France près de 1200 milliards
d’euros », à comparer avec les 1641 milliards du total de la dette
publique !
Cette
situation permet ainsi aux banques de se refinancer auprès de la
BCE à moins de 1% et de fixer des taux exorbitants aux États. Plus de 4% pour
la France qui bénéficie pourtant d’un AAA auprès des agences de notation, plus
de 6% pour l’Italie, plus de 14% pour la Grèce
Loin de
jouer un rôle de financement auprès des Etats, la BCE crée des centaines de
milliards de liquidités pour refinancer les banques et les marchés sans
contreparties sur l’utilisation de ces fonds.
Un
système
devenu totalement pernicieux avec la mise en place d’outils
spéculatifs qui «à l’œuvre dans
la crise de 2007-2008 sont restés
quasiment intacts: Paradis fiscaux, opacité des transactions,
«produits
dérivés» et «ventes à
découvert» utilisés sur des marchés
orientés à la
baisse, avant souvent de racheter plus tard des titres à prix
diminués»
Et
la
motivation des spéculateurs ne s’embarrasse d’aucun
état d’âme, « L’Italie
est visée par des spéculateurs qui ne cherchent plus
à se faire rembourser mais
parient sur sa faillite.
3. Explosion
de l’endettement privé. Depuis 30 ans, la part des salaires dans la redistribution des richesses
n’a cessé de baisser au bénéfice des revenus du Capital qui ont ainsi récupéré
plus de 10 points. Résultat «pour maintenir le niveau des débouchés
économiques le capitalisme financier a généré un endettement massif de tous les
agents économiques» et il a pris le dessus sur l’économie réelle.
Selon Jacques de Larosière, ancien directeur du FMI, en 2007 aux USA, 40% des
profits étaient réalisés par les seules institutions financières. On fait de
l’argent avec de l’argent.
L’endettement
privé (banques, ménages, entreprises) est devenu gigantesque. Les crises
américaines, irlandaises, espagnoles, sont d’abord des crises de dettes
privées, le sauvetage des banques, les auront transformées en
dettes publiques. « Privatiser les profits et socialiser les
dettes » telle est la politique mise en œuvre par les politiques libérales.
4.
Avec les cadeaux aux banques, les cadeaux aux riches. Après avoir réduit les marges de
manœuvres financières des Etats, après avoir généré l’endettement massif des
agents économiques, les politiques libérales se sont attachées à réduire au
maximum le poids de l'impôt sur les plus riches. De cadeaux fiscaux en
réductions de l’impôt sur les bénéfices, cette politique a fait perdre des
milliards aux finances publiques. Pour la France les cadeaux fiscaux représenteraient
110 milliards par an…..
Une
situation que résume avec force le milliardaire Warren Buffet
"Alors que les classes pauvres et les classes moyennes se battent pour
nous en Afghanistan, alors que la plupart des Américains luttent pour boucler
leurs fins de mois, nous, les mégariches, continuons de bénéficier d'exemptions
fiscales extraordinaires".
Voici donc résumées
brièvement les 4 causes principales de
la crise.
1 ) Une
cause endémique au système
2) Des Etats
qui doivent recourir aux banques pour se financer
3) la part
des salaires dans la redistribution des richesses
4) les
cadeaux aux banques, les cadeaux aux riches
Quelles sont les conséquences ?
Pris en
tenailles entre des marchés financiers voraces et des moyens d’agir
volontairement réduits les États et les peuples à voir automatiquement :
1. leur endettement
public explosé.
Pour la
France il est passé de 30% du PIB en 1973 à 87% aujourd’hui.
Cette
situation n’est pas due aux acquis sociaux qui couteraient trop chers ou bien
encore au poids de la masse salariale. Non, c’est la résultante d’une
politique soumise aux exigences de rentabilité, de profit d’une minorité et à
la soumission d’une grande partie de la classe politique, à droite bien sûr
mais aussi à gauche.
De ce point
de vue les déclarations des candidats à la primaire socialiste sont inquiétantes:
ils ne s’émancipent pas des marchés financiers. Il n’ont pas pris ou ne veulent
pas prendre la mesure de la gravité de la situation à part peut-être
Montebourg ?
2. Le cercle
vicieux de l’austérité et des récessions.
Non
seulement les Etats et les Banques Centrales ont du injecter des milliards de
liquidités pour soutenir les banques et les marchés financiers, mais cette
crise financière s’est répercutée sur « l’économie réelle »
entraînant récession, chômage, pertes de recettes publiques et dépenses
supplémentaires. Par exemple pour la France, 1% de croissance en moins c’est
près de 10 milliards de recettes publiques en moins. Autrement dit, soit le
déficit s’aggrave mécaniquement de 10 milliards, soit patronat, gouvernement et
instances européennes coupent dans les dépenses publiques et dans la protection
sociale utile, renforçant le marasme économique et l’impasse financière !
En
2009-2010, les déficits publics et de la Sécurité
Sociale ont été accélérés par
ce manque de recettes, et les « politiques de
relance », pourtant
couteuses ont largement été inefficaces car
aspirées pour l’essentiel par le
soutien aux marchés financiers. Il faut sortir de ce cercle
vicieux.
3. La
compression du pouvoir d'achat de l'immense majorité des salariés et de leur
famille, influe directement sur l'activité économique réelle qui
est en panne, et que l’Etat exsangue est incapable de compenser par une
politique économique adaptée.
Loin de
tirer les leçons des crises à répétions et de l’impasse dans laquelle nous pousse
la cupidité des marchés financiers, nos leaders politiques ne font que suivre
les recommandations de ceux –là même qui ont échoué.
Des
recommandations qui malgré les erreurs et les échecs, qui se cumulent plan
après plan, vont toujours dans le même sens : privatiser, démanteler….. Il
en est ainsi de la BCE qui, début août 2011, adresse une lettre au
gouvernement Italien pour exiger « d’adopter au plus vite » des
mesures pour "Moins de rigidité sur les contrats à durée indéterminée,
interventions sur l'emploi public, contrats de travail stimulant la
productivité" et la privatisation "des sociétés municipales gérant
déchets, transports ou distribution d'électricité".
Le cynisme
n’a plus de limite quand le dirigeant d’une agence de notation déclare :
en France la réforme des retraites en 2010 était "une mesure
intelligente" "un exemple de politique budgétaire bien conçue".
Pour rappel, les agences de notations attribuaient une bonne note à la banque
Lehman Brother quelques jours seulement avant sa faillite.
Est-il possible de faire autrement ?
A
entendre et à lire, l'immense majorité de la classe politique et
des experts répètent à l'infini le même discours « rassurer les
marchés financiers, réduire les déficits, faire des efforts »....
En décrypté cela
donne « ne vous inquiétez pas, les dettes publiques seront honorées au
centime d'euro près, le problème de la crise ce ne sont pas les marchés
financiers mais les incertitudes que fait planer le poids de la dette publique;
pour résoudre la crise il faut réduire la dette publique et par la même engager
de nouveaux efforts et cela passe par privatiser, précariser le marché du
travail, réduire les budgets sociaux ».
Le problème
de ce raisonnement est double : D’une part sa mise en œuvre ne
ferait qu'accroitre les inégalités et accélérer la récession. Christine Lagarde
elle-même l'illustre à sa manière quand, dans une déclaration du FMI le 16
août, elle demande aux gouvernements de ne pas pénaliser la croissance mondiale
en instaurant des politiques de rigueur trop lourdes. Le prix Nobel, Joseph
Stiglitz est encore plus clair : «Renforcer l’austérité n’aura pour
résultat que de ralentir la croissance de l’Europe et d’accroitre ses problèmes
budgétaires »
D'autre part ce raisonnement
part d'un postulat erroné: «la crise c'est l'endettement public». Au lieu
d'agir sur une des causes de la crise on essaye d'agir que sur un de ses
multiples effets. Loin de résoudre quoique ce soit on laisse les raisons
profondes de la crise perdurer.
Loin d'un
alignement sur les diktats des marchés financiers des propositions alternatives
existes. Elles n’ont pas droit de cité dans les grands médias, mais pourtant
elles existent. Ainsi trois propositions fortes pour rompre avec la
spirale de la crise financière:
1. Pour
un moratoire sur la dette publique et un audit citoyen sur celle-ci. On l'a vu précédemment depuis
l'obligation faite aux États de se refinancer auprès des marchés financiers,
ceux-ci se gavent littéralement de la dette. 1200 milliards d’euros de
service de la dette, en total actualisé, versés par la France depuis 1973,
cette année cela va représenter 45 milliards d’euros !
Un audit
pour déterminer la part illégitime de la dette, due par exemple au sauvetage
des banques et des fonds spéculatifs et de décider le non remboursement de
cette part illégitime.
L'occasion
aussi d'examiner les nécessaires restructurations de dettes à engager,
pour dégonfler la sphère financière au profit de l'économie
réelle
2.
Pour un financement de l’économie et des États émancipé des marchés. Pour
ne pas replonger dans les dérives actuelles il faut remettre en cause le
recours aux marchés comme mode privilégié de financement des Etats.
Il
faut revenir à un financement direct des Etats par la Banque Centrale.
Cela passe nécessairement par une refonte des statuts et des missions de
la BCE. Sortir les Etats des griffes des marchés financiers, c'est sortir
du chantage permanent que ceux-ci exercent. C’est retrouver la maitrise d’une
véritable politique économique.
3.
Pour un crédit sélectif à l’économie. En lien étroit avec un nouveau
rôle de la Banque Centrale, la constitution d’un pôle public bancaire
privilégiant un financement utile et efficace de l’économie vers
les ménages et les entreprises
L'objectif
est de permettre un crédit à très faible taux d’intérêt pour les projets
porteurs d’emplois, de salaires, de qualifications, et au contraire à taux
dissuasifs pour les opérations spéculatives.
Ce
dispositif autour de 3 mesures fortes renforcera les réformes fiscales,
la lutte contre les inégalités, le développement de l’emploi et de droits
nouveaux des salariés dans la gestion.
De la même
manière cela pose avec force l’émergence d’outils monétaires nouveaux, pouvant
se substituer progressivement au dollar dans les transactions
internationales
« Et maintenant ? »
Deux
perspectives s’ouvrent devant nous.
Soit,
ceux-là même qui ont échoué à « maitriser la crise », ou bien encore
à « refonder le capitalisme », qui se sont montrés incapable de
« sanctionner les patrons voyous », de « brider les pratiques
spéculatives », ni de créer la moindre relance, continuent dans la
même logique. Même sous l’égide d’une « gouvernance européenne » une
telle politique de soumission aux marchés échouera mettant en péril
les conditions de vie des peuples
Soit nous
nous engageons dans la construction d’un changement politique radical. Cela
commence par briser la spéculation, s’émanciper des marchés, sortir de
l’impasse de l’austérité.
Pour
les forces de gauche cela commence par refuser au parlement la
règle d'or, les résultats du sommet européen de juillet qui sont nocifs pour la
France (ils majorent de 15 milliards la dette de la France) et pour les peuples
grec, italien, espagnol,….plongés dans des cercles vicieux sans fin d’austérité
et de récession.
L’enjeu pour
chacun d’entre nous c’est de ne pas nous laisser imposer des choix dont
nous ne voulons pas. La mobilisation, l’intervention de chacun sera
déterminante c’est l’ambition que se donne le Front de Gauche…
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